Je ne demande pas à être applaudie, je demande à être respectée...
Je ne suis pas du genre à râler, où à me plaindre de mon sort, du gouvernement, ou de la situation. Ceux qui me connaissent vous diront que je suis plutôt de celles qui apaisent, qui écoutent, qui patientent. Mais le vide intersidérale et le peu de considération des instances responsables me font réagir.
Je vis en Seine et Marne près de Fontainebleau. Les premiers jours de confinement ont été assez terribles et stressantes. A partir de l’allocution du président, il y a eu un silence radio de la part des PMI. J’ai su par une ancienne collègue du service sociale que la Pmi dont je dépends avait une réunion vendredi. J’espérais avoir des nouvelles lundi. Une rumeur courrait qu’on pourrait accueillir jusqu’à 6 enfants pour accueillir des enfants de soignants. J’accueille un enfant en situation de handicap et un enfant de soignante. En accueillir trois de plus m’a effrayé.
J’ai également une fille de 10 ans. En cm2, elle a de petites difficultés scolaires. Il faut l’accompagner dans son travail. Avec 6 enfants à la maison? Sans les mettre en danger? Avec des enfants que je ne connais pas? Dont je ne connais pas l’autonomie, l’acquisition du langage, de la propreté, avec qui je n’ai pas construit de lien, dont je ne connais pas les parents...
J’ai commencé à être inquiète mais j’ai attendu les nouvelles.
Lundi n’ayant pas de nouvelle j’ai appelé la PMI qui devant les appels affluents ne répondaient plus. J’ai appelé le RAM qui n’avait aucune réponse et me renvoyait à la PMI.
Avec les collègues on filtrait les informations. On vérifiait tout pour pas s’emballer sur les nombreuses fake news. Je n’avais pas d’enfant lundi donc je me suis chargée de passer les appels et de vérifier les infos. On a compris qu’accueillir 6 voire 10 enfants était donc possible.
Dans mon malheur j’ai eu de la chance: 2/3 des parents employeurs ont fait le choix de garder leur enfant à la maison. Seul le fils de soignant revient deux à trois jours par semaine. Ce qui est normal, ses parents n'ayant pas d'autres solutions.
Ce n’est pas le cas de tout le monde. Beaucoup de mes collègues doivent affronter des demandes de réductions d’heures, de tarifs horaires, voire de démissions. Ce qui entraîne parfois une perte de salaire de 600 à 800 euros. Sur un tarif horaire à 3,70e de l’heure, faites le calcul (y en a t-il vraiment besoin??).
Lundi soir une demi heure avant l’allocution du président j’ai reçu un mail qui m'indiquait que je pouvais accueillir jusqu’a 6 mais que nous devions attendre l’allocution du président.
Ce soir là j’ai ri. J’avais attendu des nouvelles toutes la journée et une demi heure avant que tout ne change on prenait la peine de m’informer que pouvais accueillir jusqu’à 6 enfants.
A l’annonce du confinement je n’était pas surprise. Par contre je l’ai été quand le mercredi pendant la sieste j’ai reçu un mail me disant que je ne devais plus accueillir que les enfants dont les deux parents travaillaient à l’extérieur. Le lendemain un autre envoi par mail m’informe que non on revient à 6 enfants
J’avoue qu’a partir de ce moment j’ai compris qu’on n'aurait jamais de réponses claires. J’ai écrit à mes parents employeurs en leur transmettant les mails que l’on m’avait envoyé. J’ai expliqué que ma porte était ouverte pour tous les enfants mais qu’au vu du contexte il me semblait évident et plus sage que chacun dans la mesure du possible reste chez lui. Les parents ont compris. Je reste avec l’enfant de soignant.
On en est au même point avec la paye de fin de mois. On ne sait toujours pas si on sera payé, probablement à 80 pour cent, mais peut être pas. J’ai dis au parents que cet amendement passerait sûrement mais qu’il faudrait se renseigner directement à la PMI.
Aujourd’hui je reçois donc un fils d’infirmière au soin intensif de Melun. Je me met en danger, je mets ma famille en danger. Je serai payée probablement à 80 pour cent à la fin du mois. Pas de prime de risque, pas de droit de retrait ni de médecine du travail.
Aujourd’hui on applaudit les soignants, les pompiers, les caissières.
On est les grands oubliés de cette France confinée. On oublie vite que nous permettons aussi à ces gens là d’aller bosser. Que l’on prend autant de risques que eux avec moins de droits. Je ne demande pas à ce qu’on soit applaudis ou traiter en héros. Juste avec respect.
A demain ou pas. Ce soir je suis fatiguée et désabusée. Prenez soin de vous.
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