Il n'y a pas qe Montessori dans la vie... Il y a Emmi Pickler aussi!

Quand vous rencontrez les parents employeurs, il n'est pas rare que les parents nous demandent si l'on pratique la pédagogie Montessori (voire Montessourie). J'ai déjà fait un article sur cette bonne vieille Maria, et je vous ai déjà expliqué pourquoi, Je n'ai rien contre la pédagogie Montessori (très adaptée à l'école et aux enfants en situation de handicap) mais je la trouve (et les Montessouricette ne montez pas au créneau hein c'est un avis personnelle), je la trouve pas ou peu adaptée à la petite enfance...

Bref. Je vais pas vous refaire l'article. Mais de fait, j'ai fait des recherches sur les pédagogies qui avaient été réfléchies pour la toute petite enfance et quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu'en réalité il y en avait plein. 

Bon il a fallu faire le ménage un peu là dedans, lire beaucoup, éplucher les vidéos et articles sur la question.  Mais deux pédagogies apparassaient : la pédagogie Pickler-Loczy et la pédagogie Decroly (que l'on verra une autre fois. Si vous voulez vous lancer dans une pédagogie particulière, c'est une des plus simple à mettre en place, d'ailleurs, vous vous rendrez compte que vous mettez déjà beaucoup de choses en place qui relèvent de cette pédagogie)

Mais pour aujourd'hui, on va intéresser à notre amie Emmi Pikler et sa pédagogie.

Mais c'est qui, Emmy Pickler?

 

 

Bon. Alors, au début de sa vie, elle nait à Vienne, en Autriche mais est de nationalité Hongroise. 

Bon elle grandit, on va la faire courte, Emmi Pikler fait des études de médecine et travaille en chirurgie puis en pédiatrie.

La motricité libre

Dans son cabinet, elle reçoit tout pleins d'enfants avec des dents, des bras, des doigts, des nez cassés... Et elle s'aperçoit dans le tas que plus c'est cassé,  plus c'est urbain. En gros, quand c'est cassé ça vient de la ville et plus c'est grave, plus ça vient des quartiers aisés (en gros si t'es Charles-Edouard du 16eme plus t'as de chance de finir dans un fauteuil, si t'es Kevin et que personne s'occuppe de toi, tu t'en sors)

So why?

Elle avance une hypothèse: l'enfant surprotégé, qui va être protégé dans ses mouvements par la peur de l'adulte, n'appréhendera jamais par lui même le mouvement. Il ne mesurera pas les risques, l'espace, le monde. Par conséquent, le moindre espace de liberté le met en danger puisqu'il n'a pas pu expérimenter seul le monde qui l'entoure.  

Alors là, Emmi elle découvre un truc qui va quand même changer la donne dans la médecine, la psychologie et la pédagogie de la petite enfance: "Oh! Putain! Les gamins de moins de un an sont compétant et sont capable d'apprendre seul"

Ni une, ni deux, elle prend ses bagages et se dit qu'elle va expérimenter tout ça à Budapest. Pas de bol, elle est femme et juive (en 1930 ça faisait beaucoup) du coup personne ne voulait d'elle dans les hôpitaux. Bon bah c'est pas grave, elle va travailler en cabinet. Libre de faire ce qu'elle veut: elle a des mômes à elle, des enfants en cabinet, ça suffira bien pour construire, observer et s'exercer.

Quand un parent vient dans son cabinet, c'est simple elle leur dit: "laissez le faire. Ne proposez rien. Observez le. Notez ce qu'il sait faire de nouveau. Et recommencer".

Et oui...

Emmi Pikler venait d'inventer la motricité libre. 

L'adulte référent

Bon la guerre passe. On peut pas dire que les juifs et les femmes sont mieux acceptés mais au moins ils ne risquent plus leurs vie. Elle en profite pour faire à nouveau ses bagages parce qu'il y a une pouponière rue Loczy à Budapest qui lui dit "Bah nous on a deux trois gamins qui vont pas très biens. On accueille les orphelins de guerre et vous avez l'air de pas mal vous débrouiller donc si vous pouviez nos donner une petite direction à prendre..."

Bon. Là elle met donc en place la psychomotricité libre mais les enfants, n'ont pas l'air d'aller mieux... Il ne progresse pas aussi vite qu'ils ne le devraient. Sauf un. Lui à l'air d'aller mieux que les autres.

Alors elle va l'observer pendant plusieurs jours... et qu'est-ce qu'elle s'aperçoit donc??? Que tous les soirs cet enfant, qui a sa chambre au bout du couloir, passe 10 min avec une femme de ménage qui attend dans cette chambre pour que ça sèche et qui développe donc ne relation privilégié avec lui. Elle lui parle.

Forte de son observation, elle arrive le lendemain en réunion et leur dit " Les gars, on ne fonctionne plus comme ça. Chaque adulte va s’occuper de cinq enfants mais ce sera toujours les mêmes. Mais on s'arrête pas là. Vous allez leur parler.. Tout le temps... Vous allez tout leur expliquer: vous changer une couche? "Viens Gerard je change ta couche", vous l'installer sur le tapis "Je vais te mettre sur le tapis pour que tu puisses jouer... etc... Allez on se bouge les miches".

La fille badass: deux pédagogies en moins de 10 ans, en étant juive, pendant la décennie de la seconde guerre mondiale. Je crois qu'elle nous aligne tous là...

Comment je m'en inspire au quotidien?

Pour commencer, contrairement à beaucoup de mes collègues, je ne propose rien. Je laisse les jeux à disposition, placer par secteur et je les laisse se débrouiller. 

Les laisser se débrouiller ça ne veut pas dire ne rien faire. Généralement je m'assois par terre et je les observe. Le portable à porter de main, je les filme et les photographie. Je les regarde faire. Lorsqu'ils sont en difficulté, je les aide, attendant toujours qu'ils me manifestent leur demande. 

Chez les petits, j'ai un tapis où j'étale toute sorte de jouets pour les inciter à se déplacer. Quand ils sont en difficulté, ils râlent ou pleurent, je les aide alors à attraper ou à se remettre en place.

Les grands explorent les jeux. Ce qui est drôle c'est que les jouets qui ne sont pas adaptés à leur âge, c'est un peu comme si ils ne les voyaient pas... Au fur et à mesure qu'ils grandissent, ils découvrent les jouets, et les explorent, comme une découverte qui va changer le monde.

La parole

Je leur parle tout le temps, leur explique tout. Les grands, je leur donne un emploi du temps de la journée. Sur tous les gestes de soin, de repas, j'explique ce que je fais. Ça permet un échange avec l'enfant et bien souvent, il t'aide car ils sait ce que tu es en train de faire. J'essaie d'adopter un ton le plus doux possible (mais bon, l'italienne qui sommeille en moi reprend parfois le dessus), et j'adapte mon langage à l'enfant et à ses capacités (non pas à son âge, chaque enfant à ses propres capacités qui varient selon son développement et son domaine de prédilection.)

Je n'applique pas à proprement dit cette pédagogie mais je m'en inspire beaucoup. Je m'inspire d'autres courant mais cette pédagogie est en quelques sorte ma base pour construire tout mon univers de travail. Vous pourrez trouver sur youtube des reportages sur la pouponnière de Loczy qui montre de façon très claire toute cette pédagogie mais également ses limites...

J'espère que vous aurez découvert pleins de choses aujourd'hui!

A demain. Ou pas.