A toi la nouvelle maman

 A toi la jeune maman, dans son quatrième trimestre ou un peu plus, qui entend partout qu'être maman "c'est formidable, c'est le plus beau métier du monde". 

A toi la jeune maman, à toi dont la mère/voisine/abonnée instagram/ illustre inconnue/ soeur/ Belle-soeur/ Belle-mère... (rayez la mention inutile si besoin) explique chaque jour, combien tu ne sais pas faire, et ce qu'il serait mieux de faire avec ton bébé.

A toi la jeune maman, qui secrètement et avec honte, rêve d’arrêter l'allaitement parce que c'est difficile et qu'un biberon permettrait au papa de se lever la nuit, qui a acheté une sucette finalement parce que l'entendre hurler pour le sein c’était plus tenable, qui le fait dormir dans le landau parce qu'il s'y endort tellement plus facilement.

 A toi qui pleure un matin sur deux parce que tu es fatiguée, que tu te sens nulle et mauvaise mère. 

 A toi qui te demande si tu y arriveras un jour, et ce qu'il t'as prit de vouloir un enfant.

 A toi qui rêve d'aller chez le coiffer seule, au cinéma, boire des verres chez les copines sans te demander si Jules a fait caca ou l'entendre pleurer car c'est l'heure de lui donner le sein. 

A toi qui ne comprend pas comme on peut encore dire qu'être mère c'est le plus beau cadeau du monde, que c'est formidable. Parce que non tu ne trouves pas ça formidable de ressembler à un cachalot en fin de banquise avec une boule de bowling accroché 10h/24 accroché à ton sein.


 

Je sais tu ne dis pas tout ça parce que tu as honte et tu as peur qu'au moment même où tu commences à le penser les services sociaux débarquent et t'enlèves ton fils/ta fille, alors que malgré tout ça tu l'aimes bien cette boule de bowling (et heureusement parce que si en plus tu ne l'aimais pas, ce serait de l'esclavage. Déjà qu'on n'en n'est pas loin...)

Tout va bien. Tu es parfaitement normal.

Soyons lucides et factuels. 

Tu as accueillis dans ton corps un être humain. Un être humain a poussé à l’intérieur de toi! Genre c'est alien. Tu as été malade, tu as vomi plus que ton mec un dimanche matin après le carnaval de Marseille, tu as passé la moitié de ta grossesse à te faire piquer, faire des examens, faire pipi dans des bocaux, bu des trucs immondes, attendue qu'on te dise que tout va bien. Tu as porté dans ton seul ventre 3kg de chaire humaine dont la survie ne dépendait que de toi (déjà qu'on trouve dans Pékin express que porter de l'huile dans un saladier c'est compliqué...). On t'as interdit tout ce qui pourrait t'aider moralement pendant cette grossesse: sushis, fromage non pasteurisé, viande rouge, trop de graisses, boisson sucrées, gazeuse...

 Puis une nuit, après 12h de douleurs insoutenables, on t'as demandé de pousser pour extraire par ta chatte (appelons une chatte une chatte), un bébé de 3kg, on te l'as mis dans les bras et on t'as bien fait comprendre qu'au moindre cil perdu, tu serais l'unique responsable de ce traumatisme à vie.

 Après ça à chaque caresse sur la joue, tu as eu une assemblée de femmes pour t'expliquer que d’après Isabelle Filliozat si tu caresses la joue de ton enfant de haut en bas et pas de bas en haut tu vas en faire un inadapté social. Tout le monde se soucis de ce que tu fais de mal, mais pas de ce que tu fais de toi. C'est comme si tu avais été une poule pondeuse et que maintenant tout le monde décidait à ta place comment couver ton oeuf.

Hé meuf. Quelle personne normalement constituée irait bien après tout ça?

Alors je te rassure déjà. La normalité c'est de craquer, de pleurer, d'être assommée par ce changement soudain.

Et je te rassure toujours.  Nos mères n'avaient pas Isabelle Fillioza. Bon elles avaient Dolto mais tout le monde n'y avait pas accès.

Nos mère, elles nous ont laissé pleurer, mis des tétines, repris le travail a 8 semaines après accouchement, elles ont accouché sans péridurale, elles en ont chier leur mère. Et malgré ce qu'elles disent, elles ont déprimé et voulu nous rendre, comme nous aujourd'hui, avec nos enfants. Elles ont beau nous dire "non mais on sait on en a eu trois". Elles ont eu le temps d'oublier en 30 ans qu'elles ont elles aussi voulu nous jeter du 3eme étage parce que ça faisait 18h qu'on pleurait non stop.

Et tu sais quoi le pire? Bah c'est que finalement elles ont pas du faire du si mauvais boulot que ça puisque moi je suis là en train de t'écrire, et toi tu es là en train de me lire. Et la bonne nouvelle c'est que si elles sont là à nous faire la morale, en pensant qu'on ne fait pas bien c'est tout bonnement parce qu'elles ont oublié ce cauchemar des 6 premier mois. Alors t'inquiète, tu oublieras aussi. 

Et comme t'es une mère qui se demande si tout va bien, qui se demande si elle fait bien, c'est que t'es une bonne mère. Un enfant à l'école qui demande à la maitresse si son raisonnement est bon c'est un bon élève non? Bah pour les mères c'est pareil. Tant que tu essaies, que tu te questionnes, et que tu fais les choses avec amour et que tu y donnes du sens c'est que tu es une bonne mère. T'en fais pas Martika dans maman et célèbres ce qu'elle ne te montre pas, c'est qu'elle pleure aussi des fois quand Mia pleure trois fois dans la nuit parce qu'elle a perdu sa tétine. 

Sois tranquille. Tu es la mère parfaite pour l'enfant que tu as. Pleurer c'est normal. En avoir marre c'est normal. Avoir envie de le rendre aussi. Mais c'est comme les contraction, un jour ça a une fin. Un jour, ils dorment la nuit, ils mangent à heures fixes dans des biberons et des assiettes. Un jour ils se jettent dans tes bras en hurlant "Maman!!!!". Un jour ils racontent à l'assistante maternelle que le meilleure moment de la journée hier c'est quand il a prit son bain avec maman, qu'ils ont regardé les gendarmes dans le jardin et qu'il ont mangé de la viande et des haricots verts. 


Et ce jour là tu vois, c'est demain.


Courage. Tu vas y arriver.

A la semaine prochaine. Ou pas.



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